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J'ai pensé, Monsieur le ministre, qu'au lieu de disséminer, ainsi que l'a souffert trop souvent une fâcheuse tradition, les ressources du budget des beaux-arts dans de médiocres commandes vouées à la dispersion, il était vraiment plus digne de la confiance que vous avez bien voulu m'accorder, de consacrer en bloc une grosse part de ce budget pendant trois ou quatre exercices, à entreprendre, combiner, mûrir et conduire à bien, si c'est possible, la décoration complète, immense et infinie dans ses détails d'un tel édifice national, décoration étudiée d'abord en son ensemble, puis dirigée, dans toute l'unité de son invention, de manière à en former un vaste poème de peinture et de sculpture à la gloire de cette sainte Geneviève qui restera la figure la plus idéale des premiers temps de notre race, poème où la légende de la patronne de Paris se combinerait avec l'histoire merveilleuse des origines chrétiennes de la France.

Quand vous aurez inauguré, Monsieur le ministre, le pompeux monument de l'Opéra, où notre pays a voulu montrer sans marchander, et en réunissant le faisceau de ses plus brillants artistes, ce que peut son génie appliqué à l'architecture des fêtes théâtrales, il sera intéressant de constater que les œuvres qui exigent plus particulièrement la gravité et la vigueur solide conviennent encore à nos artistes, et qu'après avoir fait preuve, aux yeux de l'Europe, de dons inestimables d'esprit, de grâce et d'élégance, ils sont capables de remonter aux sommets les plus sévères et les plus nobles de l'art religieux et patriotique.

Si cette pensée vous agrée, Monsieur le ministre, je vous prie de vouloir bien m'autoriser, dès aujourd'hui, à étudier, de concert avec M. l'architecte de Sainte-Geneviève, et après m'être assuré que la direction des bâtiments civils, de qui relève le Monument, n'a point d'autres visées pour son ornementation, un projet qui, avant d'être exécuté dans une période d'années assez étendue, puisqu'il n'employera qu'une part du crédit habituel consacré à la décoration des édifices publics, exigera de fort longues réflexions, des combinaisons décoratives fort compliquées, et qui, pour voir ses premiers travaux commandés sur les ressources de 1875, a besoin d'être sagement préparé pendant le cours presque entier de la présente année.
J'ai l'honneur d'être, avec un profond respect, Monsieur le ministre, votre très humble et très dévoué serviteur, Le directeur des beaux-arts, Philippe de Chennevières

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