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résultat analogue au premier. C'est a l'observation de suppléer à ces moyens d'exécution instantanés qu'on ne possède pas, et de conserver intacts le souvenir des aspects qu'ils auraient rendus. Mais que maintenant on prenne une partie des détails de la première épreuve et qu'on les loi joigne à une partie des détails de la seconde pour en former un tableau! Alors, homogénéité, accord, vérité de l'impression, tout aura disparu, remplacé par une note fausse, inexpressive. C'est pourtant ce que font tous les jours les peintres qui ne daignent pas observer et se servent d'extraits de la peinture déjà faite [...].
Les aspects des choses et des gens ont mille manières d'être imprévues, dans la réalité. Notre point de vue n'est pas toujours au centre d'une pièce avec ses deux parois latérales qui fuient vers celle du fond; il ne ramène pas toujours les lignes et les angles des corniches avec une régularité et une symétrie mathématiques; il n'est pas toujours libre non plus de supprimer lus grands déroulements de terrain et de plancher au premier plan; il est quelquefois très haut, quelquefois très bas, perdant le plafond, ramassant les objets dans les dessous, coupant les meubles inopinément. Notre œil arrêté de côté à une certaine distance de nous, semble borné par un cadre, et il ne voit les objets latéraux qu'engagés dans le bord de ce cadre. [...]
On a essayé de rendre la marche, le mouvement, la trépidation et l'entrecroisement des passants, comme on a essayé de rendre le tremblement des feuilles, le frissonnement de l'eau et la vibration de l'air inondé de lumière, comme à côté des irisations des rayons solaires, on a su saisir les douces enveloppes du jour gris [...].
Cependant, quand je vois ces expositions, ces tentatives, je suis pris d'un peu de mélancolie à mon tour, et je me dis: ces artistes, qui sont presque tous mes amis, que j'ai vus avec plaisir s'embarquer pour la route inconnue, qui ont répondu en parue à ces programmes d'art que nous lancions dans notre première jeunesse, où vont-ils? Accroîtront-ils leur bien et le garderont-ils?
Est-ce que ces artistes seront les primitifs d'un grand mouvement de rénovation artistique, et si leurs successeurs, débarrassés des difficultés premières de l'ensemencement, venaient à moissonner largement, auraient-ils pour leurs précurseurs la piété que les Italiens du seizième siècle gardèrent aux quatorze centistes? [...]

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